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Portrait : Claudine

On parle d’une romance sur fond de polémique.


Un homme et une femme que tout oppose se rencontrent par le biais d’une correspondance.

C’est une histoire d’amour, certes. Mais pas une histoire d’amour classique…


On parle aussi de peine de mort, sujet controversé et pourtant méconnu en Europe.


C’est surtout l’histoire d’un combat. Celui de ce couple atypique au travers une association française. Le combat et la conviction de toute une vie.


Voici le portrait de Claudine.


On parle d’une jeune femme blonde au look Barbie Rock’n Roll.


Elle est pétillante, souriante mais aussi déterminée et consciente qu’au-delà de ses convictions personnelles, elle porte désormais celles de centaines, voire de milliers de personnes, par l’action de son association.


Revenons-en au début.





Elle grandit dans le sud de la France entourée par ses parents. Elle a deux demi-frères et une demi-soeur nés d’une précédente union du côté de son papa. A cause de l’écart d’âge et d’une certaine distance géographique, ils ne tissent pas la relation que Claudine aurait souhaité connaitre avec ses frères.


Son quotidien d’enfant est néanmoins heureux et rythmé par l’école et les cours de danse classique qu’elle pratiquera à haut niveau.


Adolescente, Claudine est une jeune fille joyeuse et pétillante. Elle écoute du rock’n’ roll, elle profite de la vie, elle est entourée d’amis.


C’est encore adolescente qu’elle connaît ses premiers émois amoureux et tombe enceinte à 17 ans de son premier fils.


Elle se sent prête à assumer le rôle de maman malgré son jeune âge et c’est en toute sérénité qu’elle mène à terme sa grossesse.


A la naissance de son petit garçon, Claudine et son compagnon officialisent leur relation.

Leur vie est heureuse. Claudine s’épanouit et ils décident d’agrandir la famille. Quelques années plus tard, 3 filles voient le jour.


Une amie de Claudine lui fait part au détour d’une conversation, de sa correspondance avec un prisonnier condamné à mort aux Etats-Unis. Claudine se sent elle aussi engagée contre la peine de mort et particulièrement aux Etats-Unis. Elle ne milite pas activement mais c’est là un sujet qui l’intéresse.


La peine de mort




La peine de mort ou peine capitale est une peine prévue par la loi qui consiste à exécuter une personne ayant été reconnue coupable d’une faute qualifiée de “crime capital”. La sentence est prononcée par l’institution judiciaire à l’issue d’un procès.

D’un pays à l’autre, le terme de procès peut être différent dans son application et son organisation. Cette notion telle que nous la connaissons en Europe peut varier dans d’autres pays, notamment en Afrique et au Moyen-Orient. En effet, dans certains pays, le caractère juste et équitable d’un procès n’est pas toujours respecté.


La peine de mort est prévue dans les textes de loi de 83 pays.

En 2020, 115 pays sont abolitionnistes dont 106 pour tous les crimes.


Le site d’information participatif Wikipédia établit une situation claire des pays abolitionnistes, de l’opinion des institutions internationales dont l’ONU, et de l’histoire de la peine de mort dans cet article.

Je puise aussi certaines informations sur d’autres sites tels que les sites d’Amnesty International, de l’ACAT France.

En Bref

En 2020, on recense au moins 657 exécutions dans 20 pays. On ne compte pas la Chine parmi eux. Là-bas, ils procèdent à des milliers d’exécutions par an, leur chiffre exact est cependant gardé comme secret d’Etat.


25.000 personnes sont actuellement dans le couloir de la mort à travers le monde et ne tenant compte que des chiffres connus.


Le nombre d’exécution est en baisse ces trois dernières années.


Notons également que 86 % des exécutions enregistrées en 2019 ont lieu dans 4 pays : Iran, Arabie Saoudite, Irak et Egypte. A nouveau, sans tenir compte des chiffres en Chine.

En Asie, la majorité des pays se prononcent opposés à la peine de mort ainsi qu’en Afrique, où ⅘ des 55 pays africains l’ont abolie ou ont adopté un moratoire.


Pour rappel, un moratoire est défini telle une mesure qui suspend ou interdit l’application ou l’exécution d’une décision judiciaire ou administrative. Les pays ayant adopté un moratoire ne procèdent plus à des exécutions. La peine de mort reste cependant présente dans leur texte de loi.

En Europe, tous les Etats membres de l’Union ont aboli la peine de mort conformément à la Convention européenne des droits de l’Homme. La Biélorussie est le seul pays du continent européen qui continue à pratiquer des exécutions. En Russie, il existe un moratoire.

La peine de mort aux Etats-Unis

Elle est appliquée au niveau fédéral et, en 2020, dans 27 des 50 Etats fédérés que compte le pays, ainsi que par la justice militaire.

Les Etats-Unis font partie du cercle de plus en plus restreint des démocraties libérales qui appliquent la peine de mort.

Pour bien comprendre le système judiciaire des Etats-Unis, en voici un bref aperçu.

3 types de juridictions peuvent prononcer la peine de mort :

  1. les cours de certains Etats fédérés qui prévoient la peine de mort dans leur loi devant être validée par les juridictions.

  2. Les cours fédérales pour certains crimes fédéraux (ex : crimes sur la police, terroriste, espionnage…).

  3. Les cours militaires (loi martiale) pour des cas de militaires commettant des crimes graves.

La majorité des condamnés à mort le sont par les Etats fédérés pour meurtre aggravé. Les condamnés sont détenus sous un régime de haute sécurité dans des quartiers spéciaux des prisons appelés “couloirs de la mort”.

Ce séjour dans le couloir de la mort peut durer plusieurs décennies. En effet, les condamnés disposent d’un nombre assez important de recours. Ils font généralement usage de tous leurs recours pour repousser la date de leur exécution.

Ces recours dépendent d’un État à un autre. Il existe donc une liste de recours possibles par Etat, la plus longue étant celle du Tennessee. Certains recours sont communs à tous les Etats.

Le premier appel est souvent automatique, indépendamment de la volonté du condamné.


La correspondance


Pour rappel, c’est une amie de Claudine qui lui parle de la correspondance qu’elle entretient avec un condamné à mort aux Etats-Unis.


Claudine, déjà opposée à la peine de mort sans pour autant avoir déjà milité activement, revient quelques années plus tard sur le souvenir de cette discussion après avoir regarder sur Netflix : Orange is the new black.


Correspondre avec un condamné à mort est une façon de militer contre la peine de mort. En effet, dans les couloirs de la mort, le processus de déshumanisation est assez rapide. Les condamnés sont appelés par un numéro, ils vivent dans des cellules très étroites ne disposant que d’un lit sommaire, un WC et une table.

Les sorties, les douches sont limitées ainsi que les rations servies lors des repas.


N’ayant pas accès à des loisirs comme d’autres prisonniers, les condamnés à mort souffrent très souvent de dépression due à l’isolement et aux conditions de détention, nombreux sont ceux qui présentent aussi des TOC durant les 10 premières années de détention. Ils sont aussi souvent sujets à de fortes crises d’angoisse.


Une correspondance, sans être dans le jugement ni dans la révolte face à la peine de mort, aide le condamné à s’évader. Elle est souvent perçue par le prisonnier comme une petite fenêtre sur le monde extérieur qu’il ne verra plus jamais.


Très souvent les correspondants ont le souhait de partager leur quotidien avec le condamné à mort. La plupart du temps, c’est par le biais d’organisations que les correspondants sont mis en relation sans tenir compte de l’âge de chacun, ni du crime commis.


La correspondance se fait par voie postale. Le condamné reçoit souvent de l’argent de sa famille par un processus courant aux Etats-Unis et hautement sécurisé. Avec cet argent, il peut s’acheter un livre au sein de la prison, recevoir une quantité supplémentaire de nourriture lors du repas. Ou acheter un timbre pour répondre à son correspondant. Un programme d’emails est aussi accessible dans certaines prisons.


Il arrive aussi que le correspondant européen envoie une fois de temps en temps un peu d’argent au condamné ou joigne un timbre dans sa lettre pour lui permettre de répondre.

Les condamnés correspondent souvent avec plusieurs personnes en même temps.


Quelques semaines après son inscription au sein d’une association, Claudine reçoit le nom d’un correspondant en Floride. Elle lui écrit une première lettre en se présentant comme une femme mariée, maman de 4 enfants, souhaitant simplement échanger.


En effet, pour Claudine, la peine de mort reste une notion encore floue. Ne l’ayant jamais connue en France, la jeune femme souhaite en savoir plus, notamment découvrir l’univers carcéral de l’intérieur. Elle aimerait agir en connaissance de cause et en apprendre davantage.

C’est Ronald qui lui répondra. Il est américain et âgé d’une cinquantaine d’années. Il est incarcéré depuis environ 30 ans dans le couloir de la mort en Floride.


Lorsqu’il avait 20 ans, Ronald en compagnie d’un ami, tous deux drogués et alcoolisés, ont tué un homme qui les prenait en stop. Ronald revendique son implication minime dans ce crime. Son ami a pu éviter la peine de mort.


Une autre vie



Nouveau départ


Claudine et son mari se séparent peu de temps avant sa rencontre avec Ronald.

Dans les semaines suivantes, Claudine commence à éprouver des sentiments pour son correspondant. Sentiments qui ne feront que croître au fil des semaines. Si bien que Claudine en fait part à Ronald et émet l’idée de lui rendre visite.


Ronald tente à plusieurs reprises de l’en dissuader. Il ne répond pas à ses questions au sujet d’éventuels sentiments de son côté. Il ne répond pas non plus à ses demandes de visite.

Près d’1 an après le début de leur correspondance, en fin d’année 2019, Claudine saute le pas. Elle réserve un billet pour les Etats-Unis et confirme à la maman de Ronald sa visite.

Les deux femmes ont peu de contact entre elles, Claudine ne parlant toujours pas anglais couramment. A l’écrit, elle parvient à se dépatouiller avec des correcteurs et traducteurs en ligne bien connus. A l’oral, elle patauge totalement.


N’ayant jamais voyagé seule et avec une maigre connaissance de l’anglais, la jeune femme panique à son arrivée en Espagne, d’où décollera son avion pour les Etats Unis. C’est angoissée et la tête remplie d’interrogations qu’elle attend son vol le lendemain.


Durant cette nuit et tout le vol du jour suivant, Claudine se pose des questions sur son amour pour Ronald. Entre hésitations et peurs, elle appréhende aussi cette rencontre. C’est sa détermination qui prend le dessus et finit par la convaincre d’aller jusqu’au bout..

A son arrivée sur le sol américain, elle est accueillie par la maman de Ronald qui l’hébergera durant les premiers jours.


Claudine rencontre une femme généreuse et gentille. Elle souffre énormément de l’incarcération et la condamnation de son fils unique. Elle affirme à Claudine avoir été emprisonnée, elle aussi, ce jour-là, en même temps que son enfant.


Le temps de s’inscrire sur la liste des visites à la prison, Claudine organise sa venue : papiers d’identité en ordre, tenue vestimentaire dans le respect de la réglementation pénitentiaire…

Elle se rend pour la première fois à la prison de Floride avec la maman de Ronald.

Les étapes pour franchir le système de haute sécurité du couloir de la mort se déroulent sans encombre.


Claudine est reçue dans un réfectoire avec sa belle-mère et d’autres visiteurs. Assises à une table, les deux femmes attendent une dizaine de minutes.

C’est au terme de ce court moment que les premiers prisonniers entrent dans la pièce et s’asseyent à table avec leurs familles et visiteurs.


Claudine me décrit son attente de voir apparaitre Ronald comme les minutes les plus longues de sa vie. Un moment gravé suspendu dans le temps.


Impatiente et le cœur battant la chamade, elle ne quitte pas des yeux la porte d’où arrivent les prisonniers. Elle appréhende le premier contact, visuel d’abord. Autant impatiente qu’angoissée, elle sent défiler en elle une dizaine d’émotions différentes et tout autant de questions : si l’alchimie ressentie par correspondance n’opère pas ? Si les sentiments réels ne sont pas au rendez-vous ? S’il ne ressent finalement rien pour elle ? Si la différence d’âge les sépare ?

Et c’est pendant ce déferlement de questions dans l’esprit de la jeune femme, qu’apparait enfin Ronald. Il apparaît par cette même porte et se dirige vers le bureau pour signer les formalités habituelles. Il jette alors un œil à Claudine. Il lui sourit.


Et immédiatement, elle sait que c’est Lui. Que sa place est désormais ici, que ses sentiments sont vrais. L’alchimie opère. Et depuis, un seul souhait dans le cœur de la jeune femme : être à ses côtés.


Elle restera à table avec Ronald et sa maman durant 6 heures.

Elle se rendra chaque jour à la prison durant la semaine qui suit.


Un voyage aux USA plus tard, ils décident de se marier. C’est à cause de la crise sanitaire et du confinement annoncé en mars 2020 à travers le monde entier que sa nouvelle visite à Ronald est annulée. Leur mariage prévu pour l’été 2020 est reporté.


L'association


Sa vie de maman de 4 enfants et son élevage de chats remplissent les journées de Claudine. Éleveuse d’abord de la race Bengal et ensuite de la race Maine Coon, elle partage son temps entre ses animaux, ses tâches à la maison et ses enfants.


Depuis sa rencontre avec Ronald, Claudine a fondé l’association French Coalition Against Death Penalty.

Elle est active dans plusieurs domaines au sein des prisons.


Elle offre d’abord une assistance légale. Cela consiste par exemple en une étude de cas par un avocat ou un juriste mais aussi en l’organisation d’une assistance directe avec le prisonnier ou le soutenir dans une nouvelle recherche d’avocat.


Dans ce cadre d’assistance légale, l’association a aussi créé le programme “Wrongful conviction Monday”. Il consiste à mettre en évidence chaque lundi un cas de Wrongful conviction (erreur judiciaire) sur les réseaux sociaux et autres médias.


Le projet futur est d’étendre son réseau d’avocats et de professeurs de droit qui aideraient notamment dans la prise en charge de cas de maltraitance au sein de la prison.

Outre cette assistance légale, Claudine et les bénévoles offrent également une assistance dans les tâches administratives. Elles vont de la rédaction de courriers pour les instances administratives à la résolution de litiges. Cette aide est aussi proposée aux familles des détenus à travers le monde.

Pour elles également, l’association propose un soutien psychologique. Elles peuvent demander une assistance pour tout type de problème.


Ce soutien psychologique est aussi proposé aux prisonniers et passe notamment par le programme “Penpal” qui met en relation un détenu et un bénévole souhaitant correspondre ensemble.

Parmi ces aides morales aux détenus, Claudine répertorie sur une autre partie de son site internet (cette partie est en anglais) les blogs de certains détenus qui souhaitent faire connaitre leur cas judiciaire particulier, elle publie des statistiques pour aider à une meilleure compréhension et fait circuler des pétitions.


Une partie du site internet est consacré aux œuvres d’art réalisées par des détenus. Ces tableaux sont en vente.


Enfin, l’association aide à améliorer les conditions de vie des prisonniers dans le couloir de la mort. Par exemple, Claudine a réussi à obtenir 2 appels téléphoniques par mois autorisés pour chaque détenu au lieu d’un seul.


Pour mener à bien leurs missions, les membres de l’association travaillent avec des avocats américains, des journalistes, des professeurs en droit et en psychologie. Ils entrent en contact avec des Organisations non gouvernementales, des législateurs et des chefs d’entreprises. Les membres de l’association souhaiteraient pouvoir étendre encore leur réseau d’experts et de professionnels.

La réussite de leurs missions, leur portée et l’étendue de leur action dépendent entre autres de l’implication de chaque maillon de la chaine.


Tous les 2 mois, certains bénévoles se rendent en Floride à la rencontre des détenus. L’objectif de ces visites est la récolte d’informations qui ne pourraient être transmises par email ou par courrier, le constat sur l’avancement de certaines demandes. C’est là aussi l’occasion d’étendre et faire connaitre les actions de l’association, de rencontrer d’autres acteurs du mouvement abolitionniste, de resserrer certains liens, créer de nouveaux contacts. Les membres assistent à des réunions sur place et font entendre leur voix.


En France, Claudine est conférencière. Elle invite les citoyens à débattre sur le sujet controversé de la peine de mort. Elle participe à des émissions télévisées afin de faire connaitre son combat et son association.


L'avenir




Claudine vit au jour le jour, le plus difficile étant de vivre loin de celui qu’elle aime. Ils n’envisagent pas l’exécution de Ronald comme une fin. Claudine est d’ailleurs persuadée qu’il ne sera jamais exécuté.

Leurs projets communs concernent les futures visites de Claudine à Ronald ainsi que le déménagement de la famille française vers les Etats Unis.

Elle souhaiterait emmener ses enfants en Floride pour se rapprocher de Ronald. Mais aussi pour réaliser un rêve de petite fille et mener jusqu’au bout un nouveau projet de vie familiale. Dans un premier temps elle compte louer une maison et espère avoir la chance de devenir propriétaire par la suite.

Dans ce but, Claudine a entamé un cursus en anglais d’aide juridique pour trouver du travail une fois à l’étranger.

L’association et son action sont aussi un combat et un projet commun pour Claudine et Ronald. D’abord actif pour le couloir de la mort en Floride, le couple souhaiterait aussi venir en aide aux prisonniers dans d’autres Etats.


Dans les médias


Claudine fait parler d’elle.


Son message, elle le porte à bout de bras et elle veut le faire entendre !


Retrouvez sous ce lien un extrait de son passage dans l’émission Touche pas à mon poste !

Dans cet extrait de l’émission Ca commence aujourd’hui, Claudine évoque sa relation avec Ronald. Elle regrette cependant que l’accent soit mis sur le côté « scandaleux » de sa relation plutôt que sur les valeurs qu’elle souhaite véhiculer ainsi que l’action de son association.


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